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VIETE françois   Naissance: Fontenay-le-Comte en Vendée, 1540 Mort : Paris, 1603. VIÈTE François

Naissance: Fontenay-le-Comte en Vendée, 1540 - Mort : Paris, 1603, FRANCE.


 

On raconte que le mathématicien flamand Adrien ROMAIN (1561-1615), (qui donna 15 décimales exactes de pi), dit un jour à Henri IV (1553-1610) qu'il n'y avait pas de mathématicien en France.

Le souverain lui répondit alors : "Qu'on aille me chercher Viète".

François VIÈTE était en effet juriste et conseiller privé du Roi. Si bien qu'il était peu connu comme mathématicien alors qu'il est aujourd'hui considéré comme le premier algébriste moderne.

 

Viète et son oeuvre.


a) La vie du savant.

François VIÈTE est né à Fontenay-le-Comte en Vendée en 1540. Il fit des études de droit à Poitiers puis devint avocat.

Conseiller au parlement de Bretagne en 1573, il fut nommé en 1580 maître des requêtes de I'hôtel du Roi.

Malgré ses fonctions officielles, il développa une œuvre mathématique importante.

Il publie un traité de trigonométrie (le Canon mathematicus en 1571) comportant des tables de sinus, dans lequel il souligne la supériorité de la division décimale sur la sexagésimale. Cette prise de position assez novatrice l'expose d'ailleurs à des critiques de Joseph Juste SCALIGER (1540-1609) et Adrien ROMAIN (1561-1615).

II meurt à Paris après une période de déclin durant laquelle il s'occupa de la réforme grégorienne du calendrier qui datait de 1582 et qu'il critiqua semble-t-il à tort.

b/ L'œuvre de Viète.

Outre les travaux sommairement mentionnes ci-dessus, on lui doit une restitution d'Apollonius sous le titre Apollonius Gallus (1600).
Voici, de façon plus anecdotique, comment Jacques-Auguste de THOU (1553-1617) rapporte le déchiffrage par Viète de messages codés par les Espagnols.

Ce que je vais ajouter est peu considérable, au sentiment même de Viète, mais tout autre que lui le compterait pour beaucoup. Comme les États des Espagnols sont séparés et éloignés les uns des autres, pour garder le secret en communiquant leurs desseins et leurs conseils à toutes les parties de ce vaste corps, ils se servent de divers caractères inconnus, afin qu'ils ne viennent à être découverts. Et quand ils sont obligés d'en employer de nouveaux, ils ne le peuvent faire que longtemps après l'avoir résolu, parce qu'il faut qu'ils en avertissent auparavant les Vice-Rois des Indes.

Pendant les désordres de la Ligue (La Ligue catholique ou Sainte Ligue ou Sainte Union est le nom donné à un regroupement de catholiques, créé en France par Henri de Guise, en 1576), le codage des espagnols était composé de plus de cinq cents caractères différents.

Plusieurs de leurs lettres extrêmement longues furent interceptées, mais ceux qui avaient charge de les déchiffrer échouaient systématiquement.
Le Roi fit alors parvenir ces missives à Viète, qui les traduisit sans peine. Les espagnols en furent tellement stupéfaits qu'il propagèrent la rumeur, à Rome, et partout ailleurs, que le Roi de France n'avait découvert leur chiffre que par le secours de la Magie.

Néanmoins, l 'apport principal de Viète est surtout d'ordre algébrique.

L'idée fondamentale de Viète est I'utilisation systématique du calcul littéral. Il lui permet de traiter de façon générale un type de problèmes donnés.

  • Prenons un exemple très simple, celui de l'aire d'un rectangle.

    Trois traductions du même problème sont envisageables :

    • L'aire d'un rectangle dont les dimensions sont 3m et 4m est 3×4 m².
    • L'aire d'un rectangle est le produit de sa longueur par sa largeur.
    • A = L × l

Un problème particulier est tout d'abord exprimé, ensuite une règle donnant la solution du problème général correspondant est formulée,
enfin, une formule algébrique traduit le problème considéré.

Sur cet exemple, le pas franchi ne parait pas décisif. Cependant, si nous étudions la traduction de quelques-uns des vers par lesquels au 16ème siècle, Tartaglia dévoile à Cardan sa technique de résolution de I'équation du 3ème degré, nous comprenons mieux la supériorité d'une formule.

Lorsque le cube et les choses à côté
S'égalent à quelque nombre discret
Trouves-en deux, espacés du connu,
Et fais en sorte, suivant l'us,
Que leur produit toujours égale
Le tiers cubé des choses, net.
Et le résidu général
Des côtés cubes bien soustraits
Te donnera ta chose principale.

(Remarque: les choses sont les inconnues.)

François Viète va développer une méthode de résolution de problèmes qu'il publie en 1591 sous le nom de : "Logistique précieuse" ou art du calcul sur des symboles.

En fait, sous le nom de Logistique spécieuse, Viète fait les premiers pas vers la création d'un langage mathématique comportant d'une part des symboles (voir "L'utilisation des lettres en algèbre") et d'autre part les règles d'emploi de ceux-ci.
Viète réalise des progrès très nets en matière de calcul algébrique et d'applications de celui-ci à la géométrie des Grecs. Les problèmes classiques du second degré et du troisième degré sont traités, ainsi que nombre de problèmes de degré supérieur.
La dernière proposition du traité de Viète (l'art analytique) fonde véritablement la théorie des équations en donnant les relation entre coefficients (le terme est de lui) et les racines.

Sa logique spécieuse se décline en 3 étapes :

  1. La zététique : On traduit le problème posé par une équation après avoir assigné des lettres à chacune des grandeurs considérées.
    Les données connues sont représentées par des consonnes, les inconnues par des voyelles.
  2. L'analyse poristique : On étudie et transforme l'équation pour la résoudre.
  3. L'analyse réthique : On revient au problème initial et on en propose une solution géométrique (oui à l'époque, n'est rigoureux que ce qui est géométrique!)

Ce n'est bien sur pas sa logique spécieuse (lourde d'utilisation) que nous retiendrons pour la résolution de problèmes, mais plus sa volonté innovant d' introduire des notations. Le symbolisme algébrique est né !

c/ Les autres apports de Viète.

  • Viète décrit aussi le lien entre la trisection d'un angle et la résolution d'une équation du troisième degré.
  • Il donne également des formules exprimant sin(nq) et cos(nq) en fonction de sin(q) et cos(q).

    Remarque : C'est Laurent WANTZEL (1814-1848) qui montre en 1837 que le problème posé par les Grecs, trisecter un angle quelconque à l'aide d'une règle et d'un compas, était impossible.

 

Conclusion.

II est probable que l'évolution des notations mathématiques, très perceptible à l'époque de Viète a influencé ses conceptions. Dans l'immédiat, celles-ci n'eurent qu'un retentissement limité.
Toutefois, leur intérêt ne pouvait échapper à un homme de I'envergure du français Fermat (1601-1665) qui parle "des admirables travaux en mathématiques" de Viète. Quant à Leibniz (1646-1716), il comprit si bien la révolution constituée par la Logistique qu'il rêva d'une "Caractéristique universelle" prolongeant celle-ci.

 


Bibliographie.

  • [Audi] : J.L.AUDIRAC, Vie et œuvre des grands mathématiciens, Magnard, Paris, 1990.
  • [DaDaPe] : A.DAHAN-DALMEDICO/J.PEIFFER, Une histoire des mathématiques, Seuil, Paris, 1986. (page 104)